Montbéliard, c’est d’abord Peugeot, une usine géante, aussi grande qu’une ville, entourée d’un dense réseau de sous-traitants de la métallurgie, et notamment de fonderies.
Venus du Maroc, de Tunisie ou de Turquie, des milliers d’immigrés y ont laissé leur santé et parfois leur vie. Créer une association était une urgente nécessité.

« Ici, ont travaillé des milliers de travailleurs immigrés de toutes nationalités, souvent aux postes les plus durs physiquement et les plus exposés à des produits agressifs  », explique Bernard Leclerc, le président de l’Addeva 54, qui a apporté une aide précieuse à la naissance de cette nouvelle association.

Une explosion de maladies

«  Il y a une véritable explosion de maladies de l’amiante. Ni ceux qui sont atteints, ni les familles de ceux qui sont décédés ne connaissaient leurs droits. Les médecins ne les incitaient pas à faire une déclaration. Ces maladies restaient invisibles. Il fallait faire quelque chose. »
La naissance de l’association est le résultat d’un long et patient travail de préparation qui dure depuis quatre ans. «  Nous avons tenu plusieurs réunions d’information et commencé à étudier les premiers dossiers avec l’Addeva 54. François Lafforgue, notre avocat, est venu sur place. Sa présence a apporté de la crédibilité et de la confiance. Début 2014, nous avons senti que la situation était mûre pour créer une association. »

Exposés
au danger
sans le savoir

Le 20 février au matin se tient une réunion de travail avec Bernard Leclerc et Alain Bobbio. Mohamed a accepté d’être président. Un secrétaire et un trésorier sont désignés. On lit les statuts. Lilia, une jeune femme qui parle le français et l’arabe, se propose comme bénévole. «  Je ne connaissais pas vraiment le problème de l’amiante, expliquera-t-elle plus tard. Des ouvriers immigrés y avaient été exposés sans savoir que c’était dangereux et ils étaient tombés malades. J’ai eu envie de les aider, de m’engager à leurs côtés, de me sentir utile. Ma mère ne sait pas lire. Je sais les difficultés qu’elle a eues. J’ai pensé que je pouvais apporter aide et information. »
L’après-midi, se tient une réunion publique. Les questions fusent de la salle. Une journaliste de l’Est républicain est présente. Des ouvriers lui parlent de leurs conditions de travail, de leurs douleurs thoraciques, de leurs essoufflements... Certains ne connaissent pas le nom de leur maladie.

Comme
un phare dans la nuit...

« Pour les malades et les familles, explique Zinedine, l’association est comme un phare dans la nuit. Sa création a été vécue comme un soulagement. C’est un lieu convivial où se rencontrent des collègues en retraite depuis des années qui s’étaient perdus de vue. C’est une aide pour les démarches à faire. Sans elle, beaucoup de familles seraient perdues. »

Une première contre Peugeot

Le 10 mars deux dossiers devaient être plaidés devant le tribunal des affaires de la Sécurité sociale. L’audience est reportée au 14 avril. François Lafforgue souligne l’importance de cette action   : «  Elle a été lancée par un ancien agent de fabrication et un ancien fondeur atteints de plaques pleurales. C’est la première fois que des victimes de l’amiante engagent une action en faute inexcusable de l’employeur contre Peugeot à Montbéliard. »
En mars, Hélène Boulot, la directrice de l’Andeva, revient avec Bernard pour une première analyse des dossiers.
« Beaucoup ne sont pas complets, explique-t-elle. Les victimes et les familles ont du mal à réunir les papiers nécessaires. Les premiers scanners ne datent que de janvier 2013. Et certains comptes rendus sont imprécis, voire contradictoires. Il faudra que l’association s’empare des questions médicales. Avec l’Andeva, nous préparons une formation à Montbéliard pour les bénévoles sur la gestion des dossiers (Sécurité sociale, Fiva, faute inexcusable). »
Le dépôt des statuts est imminent. Des permanences régulières sont prévues.

----------------------------------------------

Article paru dans le Bulletin de l'Andeva n°45 (avril 2014)