Les victimes et les familles recommencent à espérer

Après les arrêts de la cour de cassation, restent mis en examen non seulement les responsables principaux d’Eternit, mais aussi les décideurs publics et les lobbyistes du CPA (comité permanent amiante), dans le dossier de Condé-sur-Noireau.


L’Andeva et la Fnath saluent l’importance de cette décision de justice

Pour la troisième fois consécutive, la chambre de l’instruction présidée par Madame Bernard, qui annulait systématiquement toutes les mises en examen, est désavouée par la Cour de cassation.
Les victimes de l’amiante et les familles reprennent espoir de voir examiner toutes les responsabilités dans un procès pénal de l’amiante.
Dans un communiqué commun, l’Andeva et la Fnath ont salué cette décision de justice.

Les contradictions de la cour d’appel

Pour motiver la cassation dans le dossier de Condé-sur-Noireau, la Cour relève deux contradictions dans les motifs invoqués par la chambre de l’instruction :
1) La chambre de l’instruction avait estimé que la politique « d’usage contrôlé » de l’amiante était justifiée par les connaissances médicales de l’époque, alors qu’on savait que les valeurs limites d’exposition en vigueur ne protégeaient pas contre le cancer.
2) La chambre de l’instruction avait estimé que le Comité permanent amiante n’avait pas eu d’influence sur les pouvoirs publics alors que ceux-ci se sont opposés à la fois au projet américain d’interdiction de l’amiante en 1986 et au projet européen d’interdiction en 1991 sur la seule base de documents transmis par le CPA.

Le rôle des industriels et des pouvoirs publics

Cet arrêt conforte la position des victimes de l’amiante qui, depuis toujours, ont dénoncé tant l’activité délictueuse des industriels de l’amiante, que celle du CPA en même temps que la carence fautive des décideurs publics.

Reprendre le dossier sans délai

Si les victimes se félicitent d’une telle décision, elles ne peuvent que déplorer les errements de cette chambre de l’instruction qui leur a fait perdre deux ans dans une procédure déjà si longue.
Elles demandent instamment que soient examinés sans délai ces dossiers par la chambre de l’instruction autrement composée.

Juger tous les responsables

Elles se félicitent enfin que l’ultime tentative des dirigeants d’Eternit pour échapper à leurs responsabilités ait échoué et qu’ils doivent désormais rendre enfin des comptes à la Justice, comme en Italie.
La route est libre désormais pour que tous les responsables de la catastrophe sanitaire de l’amiante, dont les fautes ont brisé tant de vies humaines, soient enfin jugés par un tribunal pénal en France.


 

« Nous voulons voir enfin condamnés, comme en Italie, ceux qui ont détruit tant de vies humaines »

 

Jean-François BORDE
président du Caper Bourgogne

«  Joseph Cuvelier, le grand patron d’Eternit France sera jugé.  »

« Joseph Cuvelier, pour les anciens, c’était « le Patron ».
Fils du fondateur de l’entreprise, il présidait le directoire et fixait la stratégie pour toutes les usines de France. Les directeurs d’établissements la mettaient en pratique.
L’usine de Vitry-en-Charollais employait près de 1200 travailleurs. Le Caper Bourgogne y compte aujourd’hui 123 décès dus à l’amiante. Un chiffre sous-estimé car, dans les années 60-80, le cancer du poumon c’était le tabac...
En 2011, quand la Cour d’appel de Paris a annulé les mises en examen des directeurs, nous avons eu un moment de doute. Mais la Cour de cassation a cassé cet arrêt en 2012 et rejeté le pourvoi des directeurs en 2013. Joseph Cuvelier, Vast et les autres seront jugés.
Le procureur de la République de Paris a dit que pour Eternit l’instruction serait close au premier semestre 2014 et que le procès aurait lieu en 2015. Nous le souhaitons tous, mais nous savons que, pour avoir un procès pénal comme en Italie, il faudra encore nous mobiliser
.  »


François MARTIN
président de l’Aldeva Condé-sur-Noireau

« Une satisfaction et un espoir
pour les victimes de Condé »

« A Condé-sur-Noireau, les ouvriers ont transformé de l’amiante pendant un siècle, sans protection, dans des nuages de poussières. Autour de l’usine, les prairies étaient blanches, comme couvertes de neige. L’amiante a provoqué une hécatombe dans les familles.
La Cour de cassation n’a pas suivi l’avocat général. Les prévenus sont remis en examen. Pour les victimes et les veuves, c’est une satisfaction et un espoir.
Une satisfaction, car sont poursuivis non seulement les responsables de l’entreprise, mais aussi les représentants de l’Etat et les acteurs du lobbying de l’amiante. Un espoir de les voir tous jugés et condamnés, comme Stephan Schmidheiny l’a été par la Cour d’appel de Turin.
Nous attendons de voir comment les choses vont se passer quand le dossier retournera devant la Cour d’appel de renvoi. Mais nous sentons qu’un pas a été franchi. Les mobilisations de l’Andeva et de la Fnath auxquelles nous avons participé n’ont pas été inutiles
. »


Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°44 (janvier 2014)