BERGERAC

La prévention au cœur des débats

Pendant deux heures et demie, 280 personnes ont participé à l’assemblée générale du Cerader 24 sur la prévention du risque amiante, les chantiers de désamiantage et les déchets. Des désamianteurs professionnels et les maires de plusieurs communes avaient été invités.

C’est Maurice Pierron, qui introduit la réunion.

Le Cerader lui a confié la responsabilité de vice-président chargé de la prévention du risque amiante. Il participe au groupe de travail prévention de l’Andeva. Depuis sa création, l’association a toujours voulu faire de ce thème une priorité.

A son tour, Daniel Poumeyrol dresse un rapide bilan des activités récentes de l’association.

Puis on passe à la projection d’extraits du film « Amiante, la menace inexcusable » réalisé par le Caper des Combrailles. Une épouse témoigne aux côtés de son mari gravement atteint. Des images montrent les problèmes que peut poser le stockage de déchets amiantés à proximité de maisons d’habitation.
La salle est émue. On est déjà dans le vif du sujet.

Enfouir ou inerter les déchets d’amiante ?

Georges Arnaudeau, du bureau de l’Andeva, rappelle que la torche à plasma utilisée par Inertam sur le site de Morcenx dans les Landes est actuellement le seul procédé capable de transformer l’amiante en matériau inerte.

En 2010, à l’AG du Cerader, il avait présenté un diaporama sur ce procédé. Un vitrifiat d’amiante, gros caillou noir, lisse et brillant, avait circulé de main en main dans la salle.

L’inertage par une torche à plasma a l’énorme avantage d’éliminer définitivement le danger.

Son coût est nettement plus élevé que celui de l’enfouissement. Il pourrait être abaissé par un taux d’utilisation plus important des installations (qui tournent aujourd’hui à 15% de leurs capacités) et par de nouvelles utilisations des vitrifiats.

Cela dit, la torche à plasma est un procédé qui consomme beaucoup d’énergie. Les recherches de procédés alternatifs à l’enfouissement moins coûteux et moins énergivores doivent donc être développées.

Comment désamianter en sécurité ?

Le Cerader a eu l’idée d’inviter les responsables de Greco et Blondy, une entreprise de désamiantage, à venir expliquer en détail les techniques et les mesures de prévention sur ces chantiers à hauts risques.

L’arrivée d’un désamianteur en tenue de travail fait sensation. « Quand je l’ai vu traverser la salle habillé comme un cosmonaute, dira un adhérent du Cerader, avec sa combinaison, ses bottes, ses gants et son appareil respiratoire, j’ai pensé à l’époque où on m’avait fait démonter des plaques de Fibro sans précaution, au marteau et à la clé à molette ».

Diaporama à l’appui, la présentation détaille l’organisation et les différentes phases du chantier : la zone confinée mise en dépression, les protections individuelles, les sas à traverser pour entrer en zone, la mise en sac et l’évacuation des déchets stockés en sacs spéciaux en décharge agréée…

La sécurité a un coût. L’orateur évoque les difficultés que peuvent rencontrer des professionnels soucieux de respecter la réglementation, quand ils sont mis en concurrence avec de dangereux margoulins qui « cassent les prix », en prenant des libertés avec la sécurité.

Une déchetterie agréée amiante à Bergerac 

Le maire de Bergerac parle de la nouvelle déchetterie de sa ville. Ce sera la plus importante du département.

Son accès sera gratuit. Elle couvrira une zone géographique où vivent près de 70 000 habitants. Le Préfet n’était pas favorable à l’accueil de déchets amiantés. C’est l’intervention du Cerader qui a fait pencher la balance...

La salle, silencieuse et passionnée, écoute les interventions depuis plus de deux heures.

Sanctionner lourdement les « patrons-voyous » 

C’est au tour de René Vincent, le président du Cerader, de conclure.
Après avoir dénoncé l’omerta à laquelle se heurtent souvent les victimes de l’amiante, il rappelle les actions engagées par le Cerader et l’Andeva sur le pénal, le suivi médical, la cessation anticipée d’activité amiante.
« Le gouvernement doit donner aux organismes de contrôle chargés de faire respecter la prévention les moyens financiers et humains de faire leur travail, explique-t-il. Tous les contrevenants doivent être lourdement sanctionnés. »

Il rappelle que le tribunal correctionnel de Bergerac a condamné les responsables de Manuco Lescaut pour mise en danger d’autrui ; des responsables que le président du tribunal avait qualifiés de « patrons-voyous »…

Après avoir remercié les désamianteurs présents, il poursuit : « Nous réclamons que tout ce qui concerne la santé, la sécurité la prévention dans les entreprises et dans la vie échappe à la loi du profit ! ». Le Cerader propose que les appels d’offre soient limités aux entreprises spécialisées et que les devis soient soumis au contrôle des inspecteurs du travail.

René remercie aussi les maires en soulignant que l’association comprend leurs difficultés et réclame que leurs communes puissent bénéficier de subventions de l’Etat et d’un financement par les principaux pollueurs. Il réclame aussi une étude pour définir des urgences et des priorités d’éradication de l’amiante, comme cela se fait dans les pays de Loire.
Il conclut son intervention par un appel à la solidarité et à la mobilisation.


LES MAIRES ET L’AMIANTE

Le Cerader a invité les maires de plusieurs communes pour qu’ils apportent leur part de vérité à cette assemblée.

L’un d’eux raconte : « en 2006 un diagnostic technique amiante nous a été imposé par l’État pour tous nos bâtiments et à notre seule charge ».
Le revêtement de sol d’une salle de cinéma recevant du public tous les jours contenait de l’amiante.

Il a fallu l’enlever. Le financement des diagnostics amiante et ce désamiantage ont fait un sérieux trou dans le budget municipal. Aujourd’hui le cinéma a rouvert, mais ceux qui vont voir un film marchent pour le moment sur un sol de béton brut !

Ce maire n’est pas le seul à s’être heurté à la faiblesse des moyens financiers d’une petite commune.

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Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°41 (janvier 2013)