Notre cher père est mort en 2003 d’un cancer reconnu en maladie professionnelle. Depuis plus de 5 ans nous réclamons justice.

Papa a travaillé plus de 17 ans chez Aluminium Péchiney de Nogueres (64). De l’amiante il y en avait partout. Il entretenait 146 cuves contenant 200 kilos d’amiante chacune, il les récurait à la main, sans masque, après avoir utilisé un marteau piqueur. Il travaillait dans la poussière et la chaleur. Plusieurs de ses camarades sont tombés, comme lui, malades de l’amiante.
En 2002, papa se plaint d’une toux persistante, il maigrit, s’essoufle au moindre effort. Son poumon gauche est touché.
Un après-midi, en prenant un café après une longue journée d’examens à l’hôpital, il me lance : « Je vais mourir ». Je le rassure : son cancer est opérable. Tout est encore possible...

Les chimios et les radiothérapies s’enchaînent. Après une pneumonectomie, papa se rétablit. Un lit médicalisé est installé dans le salon. Maman dort sur le canapé en lui donnant la main. Il plaisante à nouveau, joue avec son petit fils…
Mais la maladie repart. Papa l’affronte avec courage et le soutien de sa famille. Il est opéré pendant les fêtes. Nous faisons un petit réveillon dans sa chambre d’hôpital... Au printemps son état de santé se dégrade. Il nous quitte le 27 juin 2003.

Un nouveau combat s’annonce alors pour la justice. J’engage une action en faute inexcusable de l’employeur. Je contacte l’Andeva, rencontre Hélène Boulot... Commence alors, avec le cabinet Ledoux, un véritable marathon judiciaire pour faire condamner Aluminium Péchiney.
En mai 2006, le TASS de PAU nous déboute au motif que l’employeur « ne connaissait pas les dangers de l’amiante ! » Je n’oublierai jamais…

En novembre 2007, nouvelle audience à la cour d’appel de Pau. Une centaine de personnes sont venues nous soutenir. La Cour d’appel de Pau confirme l’arrêt rendu par le Tass. C’est une immense déception.
Face à cette terrible injustice, nous décidons d’aller en cassation. J’assiste à l’audience, la gorge nouée.

Le 10 décembre 2008, le téléphone sonne : la cour de cassation désavoue la cour d’appel de Pau ; elle sanctionne lourdement son arrêt et renvoie l’affaire devant la cour d’appel de Toulouse.

C’est la première fois qu’Aluminium Péchiney est mis en échec !

Le combat n’est pas fini. Cinq ans cela peut sembler long, mais ce n’est rien quand il s’agit de défendre la mémoire de son père, de nous rendre la dignité, de faire jaillir la vérité... Je suis fier de l’avoir fait.
Je remercie ma famille, nos amis, les autres victimes d’ Aluminium Péchiney, Maître Lavelle, Maître Blondel, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, l’Andeva, le docteur Bencheik, le docteur Graveaud, les infirmières Martine, Marie-Hélène et tant d’autres pour leur précieux soutien.
On ne construit rien sur le renoncement, nous avançons et avancerons encore.

José BACHIR


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°28 (janvier 2009)