Rendu public le 2 juin, le rapport de la commission d’enquête du Sénat sur l’incendie qui a ravagé l’usine Lubrizol de Rouen dans la nuit du 26 au 27 septembre 2019 met en évidence des carences majeures en matière de prévention, de gestion de crise et de suivi sanitaire.

Le 26 septembre 2019 un incendie a détruit les aires de stockage de l’usine Lubrizol à Rouen, où étaient entreposés des produits chimiques.

Un  panache de fumée toxique de 20 kilomètres de long et 6 kilomètres de large a survolé une zone géographique s’étendant jusqu’à la Belgique.  L’incendie a détruit plus de 5000 tonnes de produits chimiques et une toiture en amiante-ciment de 8000 mètres carrés

Une commission d’enquête sénatoriale a tiré un bilan de l’action des services de l’Etat avant, pendant et après cette catastropohe

La surveillance défaillante d’un site à haut risque

Lubrizol était un site à haut risque, classé Seveso 2.
Or il y a eu de graves carences dans le contrôle par les services de l’Etat qui n’avaient pas de liste à jour des produits utilisés et n’ont pas réagi lorsque les quantités stockées ont augmenté, avec un stockage de produits  sur un site voisin non classé Seveso.

Une volonté de rassurer plutôt que d’informer

Les sénateurs dénoncent « un défaut d’information du public sur les risques industriels » et un « système d’alerte inadapté » .

L’Etat a été incapable de délivrer « une information claire en temps réel ». Il y a eu un: manque de transparence et une  « cacophonie » dans les interventions des ministres qui ont voulu rassurer à tout prix sur l’absence de risque toxique, alors que les effets des cocktails chimiques formés par l’incendie étaient - et restent encore - inconnus.

La communication de crise doit être totalement revue.

Le choix d’un suivi sanitaire a minima

Alors qu’on constate des signes de stress post-traumatique dans la population et une crainte des effets différés des cancérogènes, Santé publique France a abandonné le projet d’un suivi à long terme des populations exposées au feu (salariés de Lubrizol, pompiers).  Et l’enquête qu’elle a prévue ne commencera qu’à l’automne.

Les sénateurs demandent l’application du principe de précaution et l’ouverture de registres de suivi des cancers et des malformations congénitales.

Ils regrettent l’absence de d’études des conséquences de cet accident industriel sur l’environnement.

Indemniser les préjudices des victimes

La commission note que « Lubrizol a mis en place deux fonds d’indemnisation à l’amiable, l’un pour les agriculteurs, l’autre pour les entreprises et les collectivités locales sous le regard bienveillant de l’Etat. ».

Or « ce mécanisme dérogatoire implique une renonciation contractuelle à toute action contre Lubrizol ».

Il ne couvre qu’une partie des préjudices et de nombreux particuliers n’y ont pas accès.

La commission se prononce pour une indemnisation de tous les préjudices.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°63 (juin 2020)