Atteint de plaques pleurales et d’une asbestose pulmonaire reconnues en maladie professionnelle, Henri Boumandil, secrétaire de l’Addeva 93, a vu son handicap respiratoire s’aggraver fortement depuis 15 ans. Depuis 4 ans, il vit 24 heures sur 24 sous assistance respiratoire, s’essoufflant au moindre effort.

Combien vaut une vie en sursis, fragilisée à l’extrême par la maladie ? Telle était la question posée à la Cour d’appel de Paris à l’audience du 1er septembre. La CPAM estimait son taux d’incapacité à 60%. Mais la stricte application du barème lui donnait 100%. Le 23 octobre, la Cour d’appel de Paris lui a donné raison.

Combien vaut une vie sous oxygène ?

Le médecin conseil de la CPAM 93 avait donné à Henri un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 60%. Un taux dérisoire, qu’il avait vécu comme une négation de son handicap et de ses souffrances.

Henri l’avait contesté devant le tribunal du contentieux de l’incapacité, (TCI), réclamant un taux de 100%, conforme au barème de la Sécurité sociale.

Les constats de l’expert judiciaire

En 2018, le docteur Vaylet, expert judiciaire, est chargé par le tribunal de réétudier le taux d’incapacité.

Son rapport décrit une fonction respiratoire très dégradée : « insuffisance respiratoire grave », « altération sévère » de la diffusion de l’oxyde de carbone, « hypoxémie chronique », « hypertension artérielle pulmonaire ». Henri « souffre d’une dyspnée de stade IV et bénéficie d’une oxygénothérapie en continu ». Il se prononce donc pour que le taux d’IPP soit remonté à 100%.

Le 3 avril 2019, le tribunal suit l’expert et retient un taux de 100%.

Le tribunal précise que la procédure engagée par la CPAM n’avait pas lieu d’être : « la simple constatation du caractère permanent de l’assistance respiratoire » et de l’altération de la diffusion des gaz du sang « aurait dû permettre de faire droit aux demandes de Monsieur Henri Boumandil sans qu’une procédure judiciaire soit nécessaire ».

Un acharnement incompréhensible

Les choses auraient dû en rester là. Mais le service contentieux de la CPAM décide de faire appel, ajoutant aux épreuves de la maladie, celles d’un marathon judiciaire infondé.

Un acharnement incompréhensible de la part d’une caisse qui est généralement à l’écoute des victimes.

La CPAM dispensée de plaidoirie

L’audience s’est tenue le 1er septembre. Henri n’avait pu se déplacer. Le dossier a été plaidé par Stéphanie Gonsart, du cabinet Ledoux.

L’avocate de la caisse primaire avait demandé une dispense de plaidoirie. Elle est restée muette.

Stéphanie Gonsart a repris les conclusions du rapport rendu par l’expert judiciaire et rappelé le jugement de première instance. Elle a répondu avec précision aux demandes du Président, soulignant que les conclusions de la CPAM étaient fort  laconiques et ne citaient même pas l’expertise.

Elle a dit que cet appel de la CPAM, sans plaidoirie ni argument, pouvait être qualifié de procédure abusive.

« C’est un cas emblématique, dit Michel Ledoux qui accompagne Henri depuis près de 20 ans. Certaines victimes subissent une sorte de délire procédural de la part des caisses. C’est presque indécent de contester son niveau d’incapacité quand on voit son état. »

Une victoire, un exemple

Le 23 octobre, la Cour d’appel de Paris a tranché elle a fixé son taux d’IPP a 100%. La CPAM est condamnée aux dépens.

La nouvelle de cette victoire s’est vite répandue. Henri a reçu une pluie de messages de félicitations :

- Bravo, tu mérites grandement cette victoire. Justice t’es rendue, tu es un exemple pour tous.

- La preuve que la ténacité paye ! 

- La victoire d’Henri apporte du soleil dans cette année sombre pour nous tous. Cette combativité doit être un exemple,

- Enfin une libération morale et physique pour notre ami.

Henri a répondu : « Merci à vous tous pour vos bravos et autres médailles. J’y suis trés sensible et heureux d’avoir atteint mon but:.. Je respire mieux, maintenant, et je suis libre pour foncer, avec vous. »


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°64 (novembre 2020)