Le nombre de ruptures d’approvisionnement en médicaments d’intérêt thérapeutique majeur augmente depuis des années. La crise de la Covid 19 aggrave une situation pré-existante.

 Les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM) sont définis par la loi du 26 janvier 2016 (art.151) comme des médicaments de première nécessité pour lesquels « l’indisponibilité transitoire, totale ou partielle est susceptible de mettre en jeu le pronostic vital des patients à court ou moyen terme, ou représente une perte de chance importante pour les patients ».

Des pénuries massives et répétées

Des ruptures de stocks touchent des classes très
diverses de médicaments : anticancéreux, anti-infectieux, anesthésiants, médicaments du système nerveux central...

Une mission du Sénat en 2018 a indiqué que ces pénuries étaient fréquentes pour les formes injectables délivrées par des pharmacies d’hôpitaux mais qu’elles étaient aussi subies par les pharmacies d’officines.

La mission précise que « la durée moyenne des ruptures constatées en 2017 pour les MITM était d’environ 14 semaines ».

Les médicaments contre le cancer en première ligne

L’Institut national du cancer (INCa)  signale qu’une quarantaine de médicaments essentiels en cancérologie ont fait l’objet d’importantes tensions voire de pénuries.

22% des ruptures de stocks concernent des anticancéreux. 

La Ligue contre le cancer a commandé une enquête : Pénuries de médicaments : une perte de chance pour tous les malades. Focus sur le cancer. Elle montre que 3 médecins sur 4 ont déjà été confrontés à une pénurie de médicaments essentiels contre le cancer ou contre ses effets indésirables...

Une augmentation spectaculaire du nombre de ruptures

En France, depuis 2012, les industriels du médicament doivent déclarer à l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) toutes les ruptures de stock ou d’approvisionnement touchant des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur.

Le nombre de ruptures signalées à l’ANSM a presque quadruplé en six ans : entre 2013 et 2019 il est passé de 404 à 1499 (voir graphique ci-dessus).

La pandémie de la Covid 19 a aggravé la situation.

Des médicaments utilisés pour la sédation profonde ou pour l’intubation ont connu « de très fortes tensions ».

 


Une situation alarmante

Depuis le début de la pandémie, les soignants ont été confrontés à une triple pénurie :

- de moyens matériels (fermetures de lits par milliers, effondrement des stocks de masques),

- de personnel  (réductions massives d’effectifs, dans les hôpitaux et les EHPAD),

- de médicaments vitaux (ruptures de stocks en augmentation)

La pandémie révèle et aggrave chacune d’elles.  Mais toutes existaient avant.

Toutes sont le résultats de politiques publiques désastreuses dont il faudra tirer le bilan.

Dans le dernier Bulletin de l’Andeva, nous avions montré la nécessité de sauver un hôpital public « fragile, démuni, désossé » par les politiques d’austérité des gouvernements successifs.

Nous avions aussi évoqué la fonte évitable, du stock stratégique de masques protecteurs face aux épidémies.

Dans ce numéro nous insistons sur les pénuries de médicaments d’intérêt thérapeutique majeur. Ce phénomène,  apparu il y a une dizaine d’années, est aujourd’hui amplifié par la pandémie.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°64 (novembre 2020)