L’usine Valéo du Pont, à Caligny (dans l’Orne), va enfin être déconstruite.

Valéo l’avait fermée sans la désamianter en 1957. Portées par le vent, les fibres d’amiante s’échappant de ce site à l’abandon étaient une menace pour la santé des riverains.

Cette déconstruction est une victoire de l’Aldeva et l’association  « Pour une vie sans amiante à Caligny » qui la réclamaient depuis des années.

En 2009, Valeo et le ministère de l’écologie avaient passé un accord pour enfouir les déchets sur le site (en zone inondable !), sans les envoyer en décharge. La mobilisation des associations a fait échouer ce projet .

Face à l’inertie et aux tergiversations des pouvoirs publics, elles ont maintenu la pression.

Les travaux commencent. L’heure est à la vigilance pour que ce chantier à hauts risques n’expose ni les salariés ni les riverains.


JEAN-CLAUDE BARBÉ  (Aldeva Condé-sur-Noireau)

« Les habitants du Pont vivaient véritable calvaire ;  c’était une mise en danger de la vie d’autrui. »

Jean-Claude est vice-président de l’Aldeva et responsable de la commission de l’environnement, Il fait le point sur ce dossier qu’il suit depuis 2006.

« 2014 aura été une année d’espoirs et de doute. En avril le chantier s’est  mis en place, puis arrêté sans explication.

En juin, j’ai contacté le sous-préfet d’Argentan qui m’a informé que de nouvelles discussions étaient en cours entre Valeo et le ministère de L’Ecologie .

En juillet, nous avons appris avec surprise que l’Agence de l’Eau Seine-Normandie, étudiait un éventuel détournement du cours du Noireau, une rivière proche de l’usine.

En novembre 2014, j’ai écrit pour l’Aldeva à Ségolène Royal, ministre de l’Ecologie, en lui indiquant que nous étions  toujours dans l’attente des travaux ; que les habitants  du « Pont » vivaient un calvaire quotidien et qu’il y avait une mise en danger de la vie d’autrui pour toute la population vivant à  proximité de cette ruine industrielle.

Nous avons été reçus au ministère de L’Ecologie le 2 février 2015 avec Jocelyne Guillemin, habitante du Pont, fondatrice de l’association « Pour une vie sans amiante à Caligny » et Guy Cantimpre, de l’Aldeva.

Madame Patricia Blanc, directrice générale de la prévention des risques, nous a confirmé les informations données  à une réunion publique le 16 janvier 2015 : cette fois le dossier était bien finalisé. »


 

Protéger salariés et riverains

« Nous serons très vigilants pendant toute la durée des travaux. »

«  Les travaux ont commencé début mars.

Pour l’Aldeva, c’est une grande satisfaction d’avoir obtenu ce que nous exigions : le désamiantage et la déconstruction de tous les bâtiments, l’évacuation des déchets amiantés et des gravats. Il faut se souvenir qu’en 2009 le protocole signé par Nathalie Kosciusko-Morizet autorisait  Valeo à les laisser sur place !

Avec nos amis de « Pour une vie sans amiante à Caligny » Jocelyne Guillemin et Odette Goulet, nous nous sommes opposés à cette décision

L’Aldeva sera très vigilante pendant toute la durée des travaux.

Si les membres de la commission de l’environnement constatent des carences pour la sécurité des travailleurs et des habitants du « Pont » ou un autre problème, ils prendront directement contact avec Mme Blanc au ministère de l’écologie.

Je ne peux pas évoquer l’usine de Caligny sans avoir une pensée pour Maurice Leroux, Michel Davy et Rémi Goulet, qui nous ont malheureusement quittés.

En 2006 nous étions cinq personnes avec nos trois amis disparus, Bernard Brodin et moi-même, nous avons alerté les pouvoirs publics sur la présence d’amiante sur le site de  cette ancienne usine. »

 


Grand pollueur petit payeur

L’amiante de Valeo a causé des centaines de victimes. Du point de vue de la morale, tous les travaux auraient dû être à la charge du pollueur responsable.  Mais l’usine a fermé en 1957. 

Du point de vue du droit, les faits sont prescrits après 30 ans.

Valeo finance une partie des travaux, mais souligne que la Loi ne l’y oblige pas...


 

JOCELYNE GUILLEMIN, fondatrice de l’association « Pour une vie sans amiante à Caligny »

Enfin !

« Depuis plusieurs dizaines d’années, la vision de cette friche industrielle meurtrière a été notre quotidien. Certains proches, à l’initiative de ce combat, nous ont quittés durant ces années. Mais aujourd’hui encore difficile d’y croire, et c’est à eux que l’on pense.

Enfin les travaux ont débuté, les grilles interdisant l’accès au chantier sont posées, le panneau « danger amiante » est posé.

Enfin le  « gros mot » est dit.

Pendant plusieurs mois, notre vie va être chamboulée et difficile, le prix à payer est élevé pour nous. Nous qui avons fait le mauvais choix pour maintes raisons, l’ignorance de ce qui se cachait ici, la jeunesse, le manque d’information

… C’est avec l’ombre des maladies liées à l’amiante  et leurs conséquences que nous devrons vivre jusqu’à la fin de nos jours.

Sans un maire fraîchement élu en 2008 dans la commune et l’Aldeva, notre combat serait probablement resté vain.

Fondatrice de l’association « Pour une vie sans amiante à Caligny », j’ai continué l’action que
Rémy Goulet avait débuté, aidé par Jean-Claude Barbé de la branche environnement de l’Aldeva et son équipe, nous avons travaillé main dans la main. Je n’oublierai jamais le jour où j’ai reçu l’appel pour me dire : « C’est gagné ! ». Encore aujourd’hui, difficile d’y croire.

Jocelyne GUILLEMIN

 


Article paru dans la Bulletin de l’Andeva n°48 (avril 2015)