En France le système de reconnaissance des maladies professionnelles est basé sur des tableaux. Si les critères de ces tableaux sont remplis (maladie, délai de prise en charge, durée d’exposition, travaux), la maladie doit normalement être reconnue. Si ces critères ne sont pas remplis ou si la maladie n’est inscrite dans aucun tableau, elle peut reconnue par le système complémentaire (CRRMP), mais c’est plus difficile.

Les tableaux devraient évoluer en fonction des connaissances médicales et de la fréquence des maladies dans certaines branches ou situations de travail. En fait, chaque modification fait l’objet d’une confrontation entre partenaires sociaux lors des réunions du conseil supérieur. L’attitude du MEDEF est guidée par une seule préoccupation : comment payer le moins possible ? Il fait un tir de barrage pour bloquer tout élargissement, et, lorsque la modification d’un tableau est à l’ordre du jour, il manoeuvre pour restreindre le nombre de personnes concernées.

Le plus bel exemple est sans doute celui du cancer broncho-pulmonaire primitif : le tableau 30 bis comporte des critères restrictifs souvent difficiles à remplir (durée d’exposition de 10 ans, liste limitative de travaux). Le même cancer peut être indemnisé par le tableau 30-c avec des critères moins contraignants (durée d’exposition de 5 ans, liste seulement indicative de travaux), à condition qu’il y ait aussi une fibrose (plaques pleurales, épaississements pleuraux ou asbestose pulmonaire). Mais la formulation de ce tableau 30-c est plutôt emberlificotée : « Dégénérescence maligne broncho-pulmonaire compliquant les lésions parenchymateuses et pleurales bénignes ci-dessus mentionnées » (sic) !
Elle est médicalement inepte (un cancer n’est pas la complication d’une fibrose, c’est une autre maladie) et son sens est inaccessible au commun des mortels, y compris à beaucoup de médecins qui ne déclarent donc que sur le tableau 30 bis. Il serait facile de clarifier la situation en écrivant « cancer broncho-pulmonaire primitif associé à... », comme le demandent l’Andeva et les organisations syndicales, mais le MEDEF s’y oppose. Ses représentants ont même écrit au ministère pour proposer de supprimer carrément les alinéa 30-c et 30-e. Ils expliquent partout que les plaques pleurales ne sont pas une maladie et ne devraient pas être indemnisées !

Ces discussions peuvent avoir d’importantes conséquences pour l’indemnisation des victimes et des familles. Il n’est pas acceptable que l’Andeva, ne soit pas consultée lorsque des modifications du tableau 30 ou 30 bis sont en discussion. L’Andeva a demandé à la Direction générale du Travail (DGT) de tenir les engagements qu’elle avait pris à ce sujet.


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva N° 21 (novembre 2006)