« J’en ai manipulé des tonnes »

« De mes 15 à mes 25 ans, j’ai travaillé aux ateliers des chantiers de France (ACF), dans la construction navale. Dans la machine des navires, au coeur même de l’amiante, j’en ai manipulé des tonnes. La souffrance, elle ne règne pas sur le visage mais à l’intérieur des individus, dans les poumons. Je suis malade, bien atteint. Mais parler de la souffrance, ça ne sert à rien. Ce qu’il faut, c’est bouger, manifester, faire comme les Ukrainiens en ce moment, descendre dans la rue. Il nous faut nous unir contre cette calamité.

Ce qui fait avancer les idées, ce sont les manifestations, ce n’est pas de montrer la misère, ça il y en a partout. »

(Un homme dans la salle)


« Je voudrais que leur faute soit reconnue »

« Mon père est décédé il y a 8 ans. Il avait 50 ans. Il était tourneur dans un atelier de réparation navale, exposé régulièrement à l’amiante. Quand il est tombé malade, on ne comprenait pas, on ne savait pas de quoi il s’agissait. C’est l’Ardeva qui nous a expliqué. J’avais 19 ans, j’ai arrêté mes études pour le soigner, rester auprès de lui. On n’a rien vu venir, on n’a pas compris ce qui nous arrivait, en cinq mois il était mort. Ce fut une terrible claque.

Mon père, c’était le pilier de la famille. C’était pour moi inconcevable qu’il meure. Il attendait sa retraite, il avait plein de projets et, du jour au lendemain, tout s’écroule. C’est inadmissible de laisser mourir des gens dans un objectif économique ! Inadmissible aussi de ne pas reconnaître notre douleur, le préjudice sur les familles. Je voudrais que les patrons payent. Que leur faute soit reconnue. Que ça ne se reproduise plus. Il existe encore de nombreux produits dangereux. »

(Christelle Arnould,
27 ans, infirmière)


« Leur faire payer très cher la mort de nos hommes »

« J’avais des scrupules à demander les indemnité. Je ne voulais pas mettre dans la balance la vie de mon mari et cet argent. On est comme ça, nous les femmes, on est timides. Mais si on ne veut pas que ça se reproduise, il faut parler le même langage, leur faire payer cher, très cher la mort de nos hommes ! »

(Lydia Tomolo)


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva N°15 (février 2005)