Elle reconnaît que la protection de la santé publique justifie la décision française.
C’est une victoire du mouvement international pour l’interdiction de l’amiante.

En 1998 le Canada avait porté plainte contre la France devant l’organisation Mondiale du Commerce (OMC), considérant que l’interdiction de l’amiante constituait une entrave illégale à la liberté
du commerce.

Un premier " jugement " en faveur de la décision française avait été pris en septembre 2000, décision contre laquelle le Canada avait décidé de faire appel.

Un rapport de l’organe d’appel de l’OMC, diffusé le 12 mars 2001, confirme que la plainte canadienne n’est pas fondée et que la France peut maintenir l’interdiction de l’amiante sans encourir de représailles commerciales. Le rapport reconnaît que toutes les catégories d’amiante sont cancérogènes et que le chrysotile ne constitue pas un produit analogue aux fibres de substitution. Enfin, le rapport indique qu’aucun " usage contrôlé " de l’amiante ne constitue une alternative à l’interdiction pour prévenir les risques.


Une victoire collective

C’est une victoire de l’alliance entre le mouvement des associations de défense des victimes de l’amiante - auquel l’ANDEVA et tout le Réseau des associations locales contribuent activement - et des scientifiques, chercheurs et professionnels qui se sont engagés à leurs côtés.

Nous pouvons collectivement être fiers de cette victoire contre les industriels de l’amiante et les états qui les soutiennent.

Sans le mouvement social et les milliers de procès engagés par les victimes dans de très nombreux pays qui ont donné une visibilité sans précédent à l’épidémie mondiale de maladies liées à l’amiante, les scientifiques appelés comme experts n’auraient pu avoir le même poids dans le débat " à huis-clos " qui a abouti à cette décision de l’OMC.

De la même manière, sans le travail rigoureux de médecins, toxicologues et épidémiologistes pour apporter la vérification irréfutable de cette épidémie, le mouvement des victimes n’aurait pu asseoir sa légitimité avec une telle force.


Un formidable encouragement

Cette décision vient soutenir le mouvement mondial pour l’interdiction :

- Le Chili a adopté une loi d’interdiction à l’automne.
- Au Brésil, depuis le début 2001, quatre villes - dont la grande métropole de São Paulo - ont interdit l’amiante, en attendant l’interdiction au niveau national. Celle-ci se heurte à l’opposition de l’état de Goias dans lequel Saint Gobain et Eternit exploitent toujours la mine d’amiante qui alimente une grande partie du marché latino-américain.
- L’Australie vient de mettre l’interdiction de l’amiante à l’agenda 2001 de ses projets de réforme.

Il reste beaucoup à faire pour combattre la poursuite de marché au plan mondial (en Afrique, en Asie, dans les pays de l’est-européen). Notamment il faudra suivre l’exemple des mineurs sud-africains qui ont porté plainte devant les juridictions anglaises contre la multinationale anglaise CAPE qui exploitait les mines d’amiante en Afrique du Sud.

Il faut aussi contribuer au débat concernant la question des emplois, constamment mise en avant dans les pays qui n’ont pas encore interdit l’amiante. Tout d’abord, les multinationales doivent être contraintes d’assumer toutes les conséquences sociales et sanitaires délétères de l’expansion mondiale de l’amiante par des mesures de maintien dans l’emploi et de retraite anticipée. Par ailleurs, il faut insister sur le fait que les " besoins " sociaux auxquels répondaient l’amiante sont couverts par d’autres activités créatrices d’emploi.

Ce qui change, c’est le fait que les multinationales de l’amiante ne peuvent plus prétendre au monopole.

Il faut aussi s’engager solidairement contre l’hégémonie du commerce mondial. De ce point de vue, la décision de l’OMC comporte un vice majeur : le fait d’être l’instance de gouvernement mondial qui juge de la légitimité des décisions de santé publique prises par un état.


Article paru dans le bulletin de l’Andeva N°8 (avril 2001)