Une pétition a été lancée il y a plusieurs mois par l’ANDEVA pour être remise aux pouvoirs publics. A ceux qui signaient nous demandions des avis , des témoignages, des propositions...

Impossible de publier les 300 témoignages - souvent terribles - qui sont arrivés. En voici quelques extraits, tels que les auteurs les ont écrits.


" Mon mari a cotisé 44 ans de sa vie pour profiter 3 ans de retraite "

Mes difficultés : préjudices moraux, le traumatisme de la famille, qui doit ménager le malade qui sait ou ne sait pas que sa fin est proche. Mes problèmes : pendant un an il me restera pour vivre une allocation de veuvage... Mon mari a cotisé 44 ans de sa vie pour profiter de 3 ans de retraite avec 15 mois de souffrance... Ce qui doit changer : que Mme Aubry fasse appliquer les mesures qu’elle a annoncées. Les paroles ne suffisent pas ; ce sont les gestes qui comptent  !

N. D.
(mari décédé en 1999)


" Au chômage, je vis aujourd’hui avec 80,02 francs par jour "

Agé de 54 ans, j’ai été employé à l’usine Everite de Dammarie les Lys pendant 27 ans, en contact direct avec l’amiante. J’ai vu de nombreux camarades tomber malades et décéder. Je ne peux vous indiquer le nombre tant il y en a eu... Je me suis retrouvé au chômage et je vis aujourd’hui avec l’allocation de solidaritéspécifique de 80,02 francs par jour.

R. R.


" L’émotion me pèse encore dans la poitrine "

Cette année me verra prendre la décision de faire un contrôle de mes poumons. Serai-je atteint ?J’ai vu disparaître deux agents dans mon service, six mois après leur retraite. L’émotion me pèse encore dans la poitrine en écrivant ces lignes.

C. B.
(officier mécanicien dans la marine)


" La reconnaissance et la réparation des préjudices "

L’instruction du dossier présente de nombreux pièges et difficultés. Les efforts déployés, ajoutés à la peine, m’ont conduite au bord de l’épuisement. Le rejet de la reconnaissance a été d’ordre administratif. Des mesures sont à prendre, et parmi elles : aide morale et matérielle des victimes et ayants droit, simplifications dans les démarches à effectuer, reconnaissance et réparation des préjudices matériels et moraux.

J. S.
(mari décédé)


" Avoir un soutien psychologique "

Moralement très dur à assumer. On en parle bien un peu autour de soi, mais les gens ont l’impression que cela ne les concerne pas. Donc la personne contaminée comme la personne qui vit à ses côtés n’a aucun suivi moral pour affronter les futures difficultés de santé et financières.
Nous sommes isolés dans la région du Nord de l’Isère.
Ce qui devrait changer, c’est que les malades doivent avoir un soutien psychologique par des spécialistes et remboursé par la Sécurité Sociale, avoir une rente correcte ou un " salaire " en cas de licenciement pour inaptitude.

D. R.
(mari malade de l’amiante)


Prise en charge psychologique de la maladie.

B. M.


" Une indemnisation plus simple et plus rapide "

Depuis des décennies le monde médical, les politiques, les employeurs, etc. connaissaient les dangers de l’amiante, ont laissé faire... Pourquoi ne pas avoir des droits comme les victimes du Sida ? Création d’un numéro vert pour guider et conseiller les victimes de l’amiante, démarches, lois, adresses d’associations, de médecins spécialistes. Pouvoir bénéficier d’un suivi psychologique.
Reconnaissance et indemnisation plus simples et rapides des victimes, retraite anticipée pour toutes les catégories de victimes.

D. F.


" J’ai dû attendre trois ans... "

Epoux décédé en 1984 d’un mésothéliome. J’ai dû attendre trois ans pour que ça soit en maladie professionnelle.

N.H.


" C’est impensable que ce soit si long "

Je fais partie de l’association ARDEVAP. Chaque jour nous nous battons pour des dossiers de personnes malades et voulant être reconnues en maladie professionnelle. C’est impensable que ce soit si long. Excusez-moi mais parfois je me dis qu’on a gain de cause lorsqu’on a les pieds en avant. Mon mari et moi-même avons vu beaucoup de camarades partir.

J. et R. D. ,
anciens salariés de Ferodo Abex
à Pont L’Evèque.


" J’ai été licencié pour " inaptitude " "

Embauché comme tourneur sur métaux en janvier 68 à Beldam Latty, j’ai été fortement exposé...
En juillet 81, je me suis réveillé avec une violente douleur...
Une pleurésie fut décelée et je pus rejoindre mon domicile avec beaucoup de difficultés respiratoires trois semaines plus tard.
A l’âge de 36 ans, déjà atteint d’une maladie de l’amiante, le moral en avait pris un bon coup. J’ai été reconnu pour asbestose à 20% d’IPP.
De 1981 à 1988 j’ai continué à travailler chez Beldam Latty, tout en étant encore exposé aux poussières d’amiante.
Comme l’entreprise ne pouvait me reclasser, je me suis mis à la recherche d’un nouvel emploi. Lors d’un entretien avec la direction, je leur ai dit que j’avais été embauché pour usiner des outillages et non bouffer des poussières d’amiante...
J’ai ensuite fait une tentative de suicide, me tailladant les veines dans le bureau du directeur en présence du médecin du travail. Cela n’a pas duré longtemps. J’ai été licencié pour " inaptitude psychologique au travail de l’amiante ".

M. D.


" Se battre pour un avenir plus décent "

Il faut beaucoup d’amour et d’attention pour vivre aux côtés d’un malade de l’amiante, côtoyer sa douleur, ses essoufflements sans pouvoir le soulager... Il faut se battre pour un avenir plus décent pour les victimes de l’amiante et leur entourage.

J. D.


" Nous demandons Justice "

J’ai perdu prématurément mon époux qui n’avait que 51 ans. Il est mort dans des souffrances épouvantables après 6 mois d’agonie. Tous ceux qui savaient sont des ASSASSINS. Rien ne fera revenir ceux qui sont morts, rien ne guérira ceux qui sont malades, rien n’appaisera la douleur des familles. Mais nous demandons justice.

G. M.
(mari projeteur chez Wanner Isofi)


 

Article paru dans le bulletin de l’Andeva N°5 (juin 1999)