SCANNER OU PAS SCANNER ?

Parmi les pathologies provoquées par l’exposition à l’amiante, les cancers, en général, sont détectés à l’occasion de visites médicales à l’initiative du malade, suite à divers signes annonciateurs (douleur, toux, etc) apparaissant assez brutalement. Par contre les fibroses (asbestoses, plaques et épaississements pleuraux), qui représentent le plus grand nombre de ces maladies, progressent souvent silencieusement et sont en conséquence fréquemment détectées à l’occasion du suivi médical systématique chez les actifs ou en suivi post-professionnel.
Le diagnostic de ces fibroses repose avant tout sur les techniques de radiologie (face et profil) et de scanner thoracique (examen tomodensitométrique), la seconde de ces techniques, comme la première, impliquant un recours à des clichés obtenus en irradiant la patient avec une source de rayons X.
Les examens réglementaire de suvi médical ne prévoient en général que le recours à la radiographie simple de face. Or, il est connu depuis des années, et confirmé par plusieurs enquêtes récentes, que le scanner est très supérieur à la radio pour détecter ces fibroses, en particulier l’asbestose qui est une fibrose diffuse, interstitielle, ne donnant d’images caratéristiques que dans des stades déjà assez évolués de la maladie.
Se pose donc la question des avantages et inconvénients du scanner thoracique par rapport aux radios, d’autant que le coût du scanner n’est pas si important que l’on puisse considérer qu’il s’agit d’un obstacle majeur à son emploi généralisé dans le suivi des populations anciennement exposées.

 


LES INCONVENIENTS DU SCANNER

L’inconvénient majeur du scanner par rapport à une radio de face est l’augmentation de la dose de rayons X délivrée au patient. Encore faut-il noter que :

- la radio "profil" délivre elle-même une dose nettement plus forte que la radio de face, sans apporter beaucoup plus de renseignements,
- les appareils de dernière génération en scanner, avec recours çà un nombre limité de coupes fines en hautes résolution, permettent l’obtention de clichés fiables avec des doses de moins en moins fortes.

Aussi étonnant que cela puisse paraître, nous ne disposons pas, à l’heure actuelle, de protocole standart - issu d’une conférence médicale de consensus - sur la procédure à suivre lors d’un scanner thoracique. Aussi voyons nous certains examens effectués avec des techniques délivrant de trop fortes doses sans bénéfice pour la fiabilité de l’examen, ou encore avec injection de produit de contraste, alors que c’est inutile.
Le souci de délivrer, lors des examens, les doses les moins fortes possibles est un souci légitime. Non pas parce qu’on redoute des effets à court terme. Il n’y en a pas. Mais parce qu’à long terme les radiations ionisantes (donc les rayons X) sont cancérogènes et qu’il est probable, bien que non pleinement démontré, qu’il y a une synergie entre amiante et rayons X. La conséquence n’est pas qu’il faut se priver de l’apport indispensable de ces techniques mais qu’il faut les utiliser avec modération et discernement.

 


LES AVANTAGES DU SCANNER

Dans le suivi post-professionnel, de Clermont-Ferrand (150 personnes anciennement exposées chez Amisol et FRANCONIT), 80 scanners sont considérés comme présentant une anomalie très probablement en rapport avec une fibrose. Par contre, pour les 80 personnes concernées, la radio pulmonaire de face s’est révélée normale dans 32 cas, non concluante dans 35, et suffisante pour affirmer à elle seule le diagnostic d’une fibrose dans seulement 9 cas.
Même s’il est probablement vrai que, parmi les 32 cas de radio normale avec un scanner dit pathologique, l’essentiel des atteintes est très faible et quasiment non déclarable en maladie professionnelle, il n’en reste pas moins que l’avantage du scanner est indéniable, en particulier dans les cas de radios douteuses. Inversement, signalons qu’il existe aussi des cas où les radios pulmonaires font apparaître des images de plaques pleurales qui, au scanner, apparaissent seulement dus à des dépots de graisse.

En conclusion, en attendant des propositions précises du corps médical, il semble souhaitable, dans l’état actuel des connaissances, de préconiser un scanner thoracique dans les deux cas suivants :
- une radiographie pulmonaire douteuse quelle que soit l’ancienneté de l’exposition,
- une nacienneté de l’exposition de l’ordre de 20 à 30 ans.

Dans tous les cas, il est souhaitable que soit utilisé un appareil dernière génération, avec un nombre limité de coupes millimétriques en haute définition, et sans injection préalable de produit de contraste. Les clichés doivent être lus par un praticien ayant une certaine expérience dans les fibroses dues à l’amiante.
L’examen au scanner, plus de 20 ans après le début de l’exposition, a toutes les chances de détecter une fibrose et peut donc permettre une demande de reconnaissance en maladie professionnelle. Au stade actuel de la discussion, il n’est pas certain que le scanner doive ensuite être répété, à l’identique, tous les 5 ou 6 ans. Récemment, nous avons demandé une réunion avec les principaux médecins spécialisés dans ces problèmes. Mais nous sommes encore dans l’attente d’une réponse !


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva N°3 (juin 1997)