C’est en 2016 que les travailleurs de l’usine de pâte à papier Fibre excellence à Saint-Gaudens, aidés de leurs représentants syndicaux et de l’Addeva 65 (Tarbes), ont entamé la bataille pour le classement en « site amianté ». Un arrêté du 19 avril 2019 leur a donné gain de cause.

l a fallu deux années de lutte, de réunions avec la direction, l’inspection et la médecine du travail, d’expertises des locaux et des postes de travail pour que l’usine soit inscrite sur la liste ouvrant droit à l’Acaata pour la période 1958-1998.

Une inscription justifiée, car l’amiante était partout à Fibre Excellence : calorifugeages, joints d’étanchéité, toiture, etc.

Suite au classement de l’usine, la direction engage des travaux de désamiantage et propose au personnel partant en retraite une somme forfaitaire de 6 500 euros au titre du préjudice d’anxiété.

Mais les ouvriers décident de continuer le combat pour élargir la période de référence jusqu’en 2022. Il leur parait en effet incompréhensible que des personnes ayant été exposées dans les mêmes conditions après 1998 ne soient pas prises en compte.

Remonter le temps pour réparer les injustices

L’Addeva 65 prend contact avec les anciens de l’entreprise ayant été exposés durant toute leur carrière afin de les informer sur leurs droits. Une réunion est organisée le 28 aout 2019.
70 personnes y assistent. 

60 « dossiers anxiété », répartis sur trois groupes sont défendus par Maitre Charlotte Mérigot du cabinet Ledoux et associés devant le conseil des prud’hommes de Saint-Gaudens. 

Le tribunal condamne Fibre Excellence à verser 9000 euros à tous les membres des deux premiers groupes, sauf deux administratifs censés avoir été moins exposés. Le site a pourtant été reconnu dans sa totalité.

Le vendredi 8 avril dernier sont plaidés 24 dossiers du troisième groupe. Le délibéré sera prononcé le 17 juin 2022.

Un suivi médical empêché

Aujourd’hui, le combat continue pour obtenir un suivi médical post-professionnel pour tous. 60% des adhérents du collectif n’en bénéficient toujours pas. Certaines demandes se sont même heurtées à un refus ! Une situation qu’ils ne peuvent ni comprendre ni accepter.

« Pour avoir ce suivi, il faut une attestation d’exposition à l’amiante que l’employeur doit délivrer à chaque salarié partant en retraite, explique Me Frédéric Quinquis. Les attestations devraient en principe détailler les expositions professionnelles aux cancérogènes. Or beaucoup sont incomplètes. Certaines notifient même une absence d’exposition.

L’entreprise viole la loi, car elle ne veut pas « donner le bâton pour se faire battre », en reconnaissant qu’elle a manqué à ses obligations de protection de la santé de ses salariés. »          

Éviter des drames humains.

Epaulé par l’Addeva 65, le collectif décide de prendre contact avec tous les salariés ayant travaillé sur ce site industriel depuis sa création. « Même les travailleurs temporaires et les sous-traitants sont concernés par ce suivi. Ils doivent engager les démarches dès que possible », dit Didier Duchein. Certains hésitent à franchir le pas. Ils ne doivent pas oublier que cette prise en charge médicale est plus qu’un droit, c’est une nécessité vitale. »

Les anciens de Fibre Excellence veulent aussi et avant tout obtenir justice pour leurs camarades décédés. « Beaucoup ont œuvré avec fierté pour la réussite de leur entreprise. Ils en ont payé le prix en étant empoisonnés. Pour honorer leur mémoire nous devons éviter d’autres drames humains. Même si la lutte est longue, nous n’abdiquerons jamais ».    


Article paru dans le Bulletin de l'Andeva n°68 (juin 2022)