L’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) a édicté une norme interdisant l’importation et l’utilisation de l’amiante chrysotile, conformément à la loi sur le contrôle des substances toxiques (TSCA). L’association américaine de victimes de l’amiante ADAO a salué cette prise de position comme une avancée majeure, mais elle a exhorté le Congrès à aller plus loin en décidant une interdiction totale des six variétés d’amiante connues.

Une prise de position très attendue

En avril 2022, l’EPA s’est prononcée pour l’interdiction de l’importation d’amiante chrysotile brut et de produits contenant du chrysotile pour six utilisations jusqu’alors autorisées aux États-Unis.

Cette interdiction s’appliquerait à l’industrie du chlore-alcali – le seul importateur américain actuel d’amiante brut – qui fabrique du chlore et de la soude caustique.

Seraient aussi interdits les joints en feuilles contenant de l’amiante, les semelles de frein, les freins et garnitures automobiles de rechange, les autres matériaux de friction pour véhicules ainsi que les autres joints importés aux États-Unis.

Cette prise de position de l’EPA était très attendue par les scientifiques, les syndicats et les associations de victimes qui militaient sans relâche pour l’interdiction de ces six catégories d’articles contenant de l’amiante.

Linda Reinstein, la présidente de l’Asbestos Disease Awareness Organization (ADAO) a déclaré que les mesures annoncées par l’EPA sont
« un grand pas en avant vers l’élimination de l’exposition à une substance qui tue 40 000 Américains chaque année ».

Le lobby malfaisant des industriels du chlore

Elle a dénoncé l’attitude irresponsable de l’industrie du chlore-alcali qui a préféré utiliser pendant plusieurs décennies des diaphragmes en amiante chrysotile, en pleine conscience du danger, alors qu’une technologie fiable sans amiante était déjà mise en oeuvre dans d’autres pays.

L’Institut d’études géologiques des Etats-Unis (USGS) rapporte qu’en 2020, 305 tonnes d’amiante ont été importées aux États-Unis par les producteurs de chlore-alcali, soit une augmentation de plus de 30 % par rapport à l’année précédente !

« Les producteurs de chlore-alcali se sont opposés à toute restriction sur les importations et l’utilisation de l’amiante. Il serait indéfendable d’accorder une échappatoire à une industrie qui a fait passer ses propres profits avant la santé publique ».

Linda Reinstein craint de voir les industriels saper la mise en oeuvre des décisions de l’EPA, en multipliant les actions judiciaires, pour retarder son entrée en vigueur de plusieurs années, permettant ainsi aux importations d’amiante de se poursuivre.

« Le Congrès doit voter une loi d’interdiction  »

Les mesures annoncées par l’EPA se limitent à l’amiante chrysotile et ne couvrent pas les cinq autres types de fibres d’amiante reconnus : crocidolite, amosite, anthophyllite, trémolite et actinolite.

« Le Congrès doit voter une loi d’interdiction claire et complète des six types de fibres d’amiante reconnus », a déclaré Bob Sussman, avocat de l’ADAO. C’est le seul moyen d’empêcher l’exposition actuelle et future  à des types de fibres qui ont les mêmes effets mortels que l’amiante chrysotile. »



L’AMIANTE AUX ÉTATS-UNIS

L’amiante avait été interdit en 1989 aux USA par une réglementation de l’EPA, mais celle-ci a été annulée suite à une procédure judiciaire.

Depuis cette époque,  l’amiante est autorisé mais les importations d’amiante brut aux USA ont chuté, se concentrant pour l’essentiel sur l’industrie du chlore.

Sous la présidence de Trump, la réglementation amiante a été assouplie, ouvrant même la possibilité d’incorporer de l’amiante dans la fabrication de nouveaux produits.

Le tournant actuel de l’EPA est positif. Mais la bataille pour une interdiction complète reste encore à gagner.


Article paru dans le Bulletin de l'Andeva n°68 (juin 2022)