Elles ont un rôle essentiel pour accompagner des patients atteints d’un cancer et leurs proches durant leur parcours de soins. Elles sont infirmières à l’Institut Coeur-Poumons de Lille. Elles ont toujours travaillé en cancérologie, la première depuis 25 ans, la seconde depuis 34 ans.  Elles nous parlent de leur métier.

« L’annonce du diagnostic de mésothéliome est faite par un oncologue ou un pneumologue, explique Anne- Sophie. Après le temps médical vient le temps de l’accompagnement. Deux ou trois jours plus tard, la personne revient à l’hôpital pour la “consultation infirmière”, avec –  si elle le souhaite – un ou deux proches »

« L’annonce d’un cancer provoque toujours un choc, ajoute Peggy.  Durant  la consultation infirmière, émergent des questions que le patient n’a pas su ou pas pu poser au médecin. L’infirmière doit chercher à comprendre ce que le patient a compris et retenu des informations reçues Elle donne des explications simples, sans craindre d’appeler le cancer par son nom. »

Anne-Sophie rappelle que la consultation d’annonce a été instaurée par le plan cancer de 2005. « Les choses ont beaucoup changé depuis. Nous avons la chance de travailler avec des médecins qui ont avec le patient une relation pleine d’empathie et d’humanité. Nous formons une équipe expérimentée. Nous avons suivi des formations à l’annonce avec des psychologues. Nous avons aussi des diplômes universitaires en soins palliatifs. Et puis, il y a toute l’expérience acquise. »

Peggy explique que « la consultation infirmière permet d’aborder toutes les difficultés liées au traitement, aux conséquences psychologiques et sociales de la maladie. On évoque les soins de support »,

Peggy et Anne-Sophie savent que la confrontation avec des personnes en grande souffrance, peut déstabiliser un soignant. « Les échanges réguliers entre nous, le travail en équipe permettent de faire un débrief, d’évacuer et de prendre du recul. On peut aussi voir le psychologue du service.»

Quand on lui demande si elle estime avoir des moyens suffisants pour faire son travail, Anne-Sophie explique : «  Après le plan cancer, l’annonce a été valorisée dans le service. Un poste a été créé. Notre organisation permet de prendre tout le temps nécessaire. Une consultation peut durer une heure, voire deux heures. Les consultations infirmières sont groupées sur la même journée. Entre 8 heures et 16 heures, on peut faire trois consultations infirmières. C’est un moment très important. Le patient et ses proches arrivent souvent tendus, le visage fermé, sans parler. Au fil de la conversation on les voit se détendre. Une relation particulière se noue avec l’infirmière. Cette consultation restera pour eux un souvenir marquant. Ils nous remercient. »

 Deux infirmières et un infirmier du service coordonnateur en chirurgie thoracique de l’Institut Coeur-Poumons accompagnent les patients atteints d’un mésothéliome opérable.

« La première étape est le diagnostic,  explique Marie. En présence d’un épaississement pleural, il faut faire un prélèvement et l’envoyer en analyse. La deuxième étape est de savoir si le patient peut être opéré.  Seuls 5% des mésothéliomes sont opérablesAprès l’annonce, nous donnons au patient des explications complémentaires, en reformulant les termes qui ont été utilisés par le chirurgien, et nous apportons un soutien psychologique. »

Valérie poursuit : « Nous intervenons avant et après la chirurgie :

Avant l’intervention, nous préparons le patient, en vérifiant qu’il n’y a pas de carences ni de dénutrition et en lui proposant de la kiné. 

Après l’intervention, quand le patient est renvoyé en pneumo, nous prenons  en charge sa « réhabilitation » (en intervenant sur les conséquences de la chirurgie).

Tommy souligne l’importance du soutien psychologique : « Il existe aujourd’hui des formations au soutien que les infirmières les plus anciennes n’ont pas reçues. Leur grande expérience leur permet de s’adapter à la personnalité du patient.»

Pour Marie, « l’’infirmière est une personne ressource, que le patient reconnaît et apprécie. Il lui parle de sa vie, de son angoisse de laisser ses animaux de compagnie pendant son hospitalisation. Il sait qu’il peut la joindre sur sa ligne professionnelle.

Notre métier a une forte dimension humaine.

Il y a des moments difficiles. Si parmi nous quelqu’un déprime, le problème est traité à trois. Le travail en équipe aide à prendre du recul. Nos échanges permettent de nous vider la tête avant de rentrer à la maison.

C’est un beau métier qui demande une forte conscience professionnelle. Mais il y a une crise de la vocation.

La charge de travail (une infirmière pour 15 patients), les gardes de nuit ou du week-end n’encouragent pas les jeunes à s’engager...


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°71 (juillet 2023)