A Vitry-en-Charollais, Eternit était une usine d’amiante ciment, où 1200 ouvriers travaillaient dans les années 1970.

Les enfants jouaient à proximité de la décharge d’amiante qui se trouvait en face d’une école primaire.

Les épouses secouaient et lavaient les bleus de travail devenus blancs d’amiante.

Nous ramenions ces bleus le vendredi soir à la maison, dans le sac à casse-coûte, où nous mettions le pain et la tranche de jambon. Ma mère les secouait et retournait les poches avant de les laver.

Et puis il y avait l’amiante que nous mangions avec les pommes de terre !
Le CE commandait des pommes de terre à un producteur à des prix intéressants. Eternit fournissait les sacs en toile de jute qui avaient servi au transport de l’amiante ! D’ailleurs un des fournisseurs qui mettait les pommes de terre en sac est mort d’un mésothéliome...

Cet amiante était notre pain quotidien et la poule aux oeufs d’or de notre employeur.

Vers le milieu des années 70, quand il a vu se profiler le spectre de l’interdiction, Eternit aurait pu envisager d’autres produits de substitution, mais l’argent et la richesse étaient le seul mot de l’entreprise. La logique de rentabilité les a poussés à exploiter le magic minéral et sacrifier les vies des ouvriers, avec le chantage à l’emploi pour faire taire les plus téméraires qui redoutaient les risques de l’amiante et en compromettant la vie de tous ceux qui croyaient être en train de la gagner.

A combien va se chiffrer le nombre de victimes à Paray-le-Monial. Plus de 130 décès sur le seul établissement de Vitry-en-Charollais.

Ayant travaillé dans cette usine dès l’âge de 14 ans en 2 x 8 et à quatre heures du matin de 61 à 84, j’ai été licencié à cette date pour raisons économiques.
Je suis très contaminé par ce produit, avec de nombreuses plaques pleurales. Le résultat de mes derniers examens n’est pas bon. J’ai eu une expertise et aucune revalorisation n’est en en vue. »

Maurice VILLARD