Jean-Michel Sterdyniak

(secrétaire général du syndicat national des
professionnels de santé au travail - SNPST)

« La loi El Khomri répond aux voeux du MEDEF »

Elle vise à transformer une médecine de prévention des risques au travail en une médecine de contrôle et de tri des salariés.

« Les mots « santé au travail », « prévention » sont absents de ce texte dont le but essentiel est d’encadrer les médecins du travail et de sécuriser la situation juridique des employeurs.

Les médecins du travail devront vérifier l’aptitude des personnels considérés comme « à risques », soit parce qu’ils sont au contact de produits dangereux, soit parce que leur activité peut mettre en danger d’autres personnes.

Pour les autres salariés (parmi lesquels beaucoup de femmes), le suivi médical va se réduire.

C’est un virage majeur dans la définition même de la médecine du travail : il ne s’agit plus d’une médecine de prévention des risques au travail, mais d’une médecine de contrôle et de tri des salariés.

Des décrets vont revoir la périodicité des visites médicales qui devraient avoir lieu tous les 5 ou 6 ans. Cette mesure aura pour effet d’invisibiliser les risques. Il sera plus difficile au médecin de faire le lien entre l’altération de la santé d’un salarié et ses conditions de travail.

Le Medef souhaite que le médecin du travail devienne un outil de sélection à l’embauche, en éliminant les salariés considérés comme « à risques ». C’est un retour à l’eugénisme. On régresse de plusieurs décennies.

Le Medef reproche aux médecins du travail de ne pas faire assez de visites d’embauche. En fait, sur 30 millions de visites par an, il y a 22 millions de visites d’embauche, dont 15 millions concernent des contrats de moins d’un mois ! Ce ne sont pas les médecins qui sont responsables de cette situation. Ce sont les employeurs et les gouvernements successifs qui ont précarisé le monde du travail et sont incapables d’organiser un suivi médical des salariés à statut précaire. »